Fiches pratiques du parent

La conservation

La focalisation sur une partie seulement des indices ne permet pas non plus de maîtriser complètement la notion de conservation. Cette notion, qui peut paraître évidente pour les adultes, est en fait une notion logique qui est à la base de la pensée.

Quand on fait comparer deux boules de pâte à modeler strictement identiques, l’enfant de 4 ans admet sans aucun problème que deux boules sont semblables. Mais il affirmera que la boule de pâte à modeler contient moins de pâte que la même boule écrasée en galette, car elle est plus petite. Il appliquera le même raisonnement à un verre d’eau bas et large, versé ensuite dans un verre haut et étroit : il pense qu’il y a plus à boire dans ce deuxième verre car l’eau monte plus haut. De même, une rangée de 6 jetons en contient plus quand les jetons sont écartés que lorsqu’ils sont resserrés. Il n’a pas compris que les changements d’apparence laissent pourtant quelque chose de constant, de permanent : la quantité. Un dernier exemple montre comment l’enfant raisonne. Une mère doit utiliser 100 g de fromage râpé pour faire une recette. Elle prend un morceau de gruyère, le pèse et le donne à l’enfant pour qu’il le râpe. Ce dernier lui explique que ce qu’elle a fait ne convient pas : c’est après avoir râpé le fromage qu’il faut le peser. La preuve, c’est que sur le plateau de la balance, le fromage râpé occupe plus de place que le fromage entier !

On comprend le point commun à tous ces raisonnements. L’enfant s’appuie sur des règles qu’il a élaborées à partir d’indices fournis par les expériences quotidiennes et qui conduisent le plus souvent à une analyse correcte des situations. Il est vrai que lorsqu’on verse de l’eau dans un verre, plus le niveau monte, plus il y a à boire. De même, quand une rangée d’objets est plus longue, c’est que généralement elle contient plus d’éléments. L’enfant se laisse piéger par les indices les plus saillants mais en néglige d’autres. Pour quoi ne se laisse-t-il plus piéger ensuite ? Une des raisons tient à la maturation du cerveau et en particulier des zones préfrontales, responsables de l’inhibition. La réponse qui semble évidente, mais mauvaise, peut alors être inhibée et laisser place à la prise en compte d’autres aspects tout aussi essentiels que ceux sur lesquels ils se focalisaient exclusivement avant. À 6 ans, les enfants donnent des réponses sur le ton de l’évidence, au point qu’ils trouvent les questions de l’adulte un peu stupides ! Ils ont compris que quelle que soit la forme, la quantité reste la même.

Cette maîtrise complète de la conservation est capitale pour la compréhension des nombres et notamment les mesures. Les quantités restent invariantes, quel que soit l’espace occupé. Un kilo par exemple reste invariant, qu’il s’agisse d’un kilo de plumes ou d’un kilo de plomb.