Fiches pratiques du parent

Le développement du langage

À savoir

  • Parmi les précurseurs du langage, il en est un qui est fondamental : le pointage du doigt. Avec ce geste, l’enfant signale à l’adulte un objet (ou une personne…) et demande un partage d’attention. Il n’est cependant pas rare que ce geste soit ambigu : que désigne l’enfant ? Seul le mot viendra, ensuite, lever cette ambiguïté.
  • De 2 à 6 mois, les productions vocales sont essentiellement des voyelles (a, eu). Le bébé gazouille, ce qui lui permet d’exercer son appareil phonatoire (ensemble des organes de la voix permettant la production des sons).
  • Vers 6 mois apparaît le babillage proprement dit, où l’on entend de plus en plus distinctement des syllabes. Au cours de celui-ci, l’enfant s’exerce à prononcer toutes sortes de sons, certains présents dans la langue maternelle, d’autres non. Ces derniers disparaîtront faute d’être renforcés (d’où l’intérêt d’apprendre des langues étrangères tôt).
  • Dès 8 mois, le babillage reproduit les intonations et les modulations de la langue dans laquelle le bébé est élevé, témoignant ainsi de sa sensibilité à l’entourage et à son imprégnation. La compréhension d’expressions rituelles (coucou, bonjour, dodo…) est manifeste.

L’activité cérébrale du bébé
L’imagerie cérébrale a permis de mieux comprendre le fonctionnement du cerveau. On sait par exemple que lorsque le bébé de 2 mois regarde un visage humain, les mêmes zones du cerveau que chez l’adulte sont activées. Mais, en plus, une région traitant les voix est activée, ce qui n’est pas le cas chez l’adulte. On pense que cette activation permet au bébé d’associer visage et voix. Cette activation n’aurait plus lieu ensuite, lorsque les visages muets sont perçus. On a pu montrer que la zone du cortex (substance grise qui recouvre les hémisphères cérébraux) qui traite les stimulations visuelles est tout à fait active chez les aveugles, mais elle est utilisée notamment pour la lecture du braille (informations tactiles). Grâce à l’imagerie cérébrale on a pu mettre en évidence qu’entre 6 et 10 mois les bébés perdent la capacité à reconnaître tous les sons de toutes les langues. Leur cortex ne réagit plus qu’aux sons qu’ils ont l’habitude d’entendre.

Premiers mots produits : à la fin de la première année

  • Les premiers mots sont toujours formés de la répétition de deux syllabes comme mama. Ils apparaissent en moyenne vers 10 mois.
  • Les enfants à cet âge sont capables de faire la différence entre consonnes et voyelles.
  • La compréhension est plus difficile à estimer car l’enfant s’appuie beaucoup sur le contexte pour comprendre la signification d’un mot. En l’absence d’indices contextuels, la compréhension est donc plus tardive. On considère que les premiers mots sont compris vers 11 mois.
  • Pour comprendre un mot il faut déjà l’avoir identifié, donc isolé dans le flux de paroles entendu. Pour cela les petits s’aident du rythme de la parole qui leur permet, du moins en français, de repérer les syllabes formant les mots.

Mot phrase : de 10 à 18 mois

  • Les premiers mots prononcés sont souvent déformés et sont le plus souvent compréhensibles uniquement en fonction du contexte. Et un même mot aura une signification différente selon les situations, bien que son emploi soit approprié. Parti sera ainsi utilisé pour évoquer le départ de la mère le matin (Maman est partie travailler), l’envol de l’oiseau vu à travers la fenêtre (L’oiseau est parti) ou l’arrêt de la télévision (Les images sont parties).
  • Un mot seul correspond à une phrase implicite que les petits sont incapables de produire, bien qu’ils comprennent celles qu’on leur adresse.
  • À 15 mois l’enfant produit une quinzaine de mots en moyenne. Mais les différences interindividuelles sont importantes. Tout dépend de l’environnement social, du rang dans la fratrie, de la personnalité de l’enfant.
  • Le nombre de mots nouveaux évolue très lentement à partir du moment où l’enfant produit les premiers. Il lui faut environ cinq ou six mois pour acquérir une cinquantaine de mots.

Association de deux mots : vers 18 mois-2 ans

  • L’acquisition du langage ne se fait pas uniquement par imitation de ce qui est entendu. Dès l’association de deux mots, l’enfant utilise une grammaire qui montre qu’il est capable d’utiliser des règles qu’il a extraites du langage parlé autour de lui.
  • Deux types de mots sont employés par l’enfant. Les premiers forment une catégorie restreinte qui va modifier le sens du vocable associé. Ce sont souvent des mots qui seront, par la suite, des adverbes ou des verbes. Certains sont forgés par l’enfant comme : apu pour il n’y a plus. Les seconds forment l’essentiel du lexique de l’enfant, il s’agit généralement des noms communs ou des noms propres.
  • L’association de ces deux types de mots permet de rendre compte d’une grande variété de relations comme : la disparition (apu bonbon), la demande (encore bonbon), la localisation (bonbon là), la possession (à moi bonbon)… L’ordre peut changer, certains préférant dire bonbon à moi.
  • C’est l’âge de l’explosion lexicale. D’une cinquantaine de mots à 20 mois, le répertoire passe à près de deux cents mots quatre mois plus tard.
  • La signification des mots chez l’enfant ne recouvre pas toujours celle des adultes. Un même mot va désigner une catégorie beaucoup plus large que celle qui est communément admise. Ainsi les hommes sont des papas. Inversement d’autres mots auront un sens plus restreint : le mot bébé pourra désigner seulement l’enfant luimême, car ses parents l’appellent ainsi, et non l’ensemble des très jeunes enfants.

Premières phrases : entre 2 ans et 3 ans

  • L’enfant combine maintenant trois ou quatre mots. Leur ordre est le plus souvent respecté, ce qui est essentiel pour comprendre qui est le sujet et qui est l’objet dans la phrase. Les prépositions apparaissent et structurent les relations entre les mots.
  • Au début, il est fréquent, et normal, de trouver des écarts avec le langage des adultes. Les erreurs commises par l’enfant expriment l’application de règles qu’il a repérées dans la langue mais qui ne s’appliquent pas dans tous les cas. Les conjugaisons des verbes en fournissent de nombreux exemples : il a prendu, conjugué sur le modèle de vendre ; il a mouru, conjugué sur le modèle de courir.
  • L’acquisition du vocabulaire continue et se fait souvent à partir de mots connus. Par exemple, un enfant voyant une écumoire parle de tuillère. L’adulte présente le mot nouveau en établissant un lien de ressemblance : une écumoire, c’est une sorte de cuillère mais avec des trous. L’enfant peut ainsi rattacher ce qu’il découvre à quelque chose de connu.
  • L’enfant à cet âge invente aussi des mots ou des expressions pour pallier ses manques. Un facteur est le monsieur des lettres, les griffes sont les dents des pattes. Certaines règles, comme dans le cas de la conjugaison, sont généralisées à tort mais là encore montrent que l’enfant a repéré des régularités dans la construction des mots, comme ce petit garçon qui demande où est la dvdcommande par analogie à la télécommande.
  • La richesse du vocabulaire ne se détermine pas uniquement en comptant le nombre de mots produits ou connus. Car les mots ne s’empilent pas dans le cerveau comme dans un dictionnaire. L’enfant, dès 2 ans, construit avec les mots des catégories. Les plus jeunes enfants ont souvent recours à une catégorisation simpliste basée sur l’opposition. Les différences exprimées sont généralement liées à une expérience affective : là/pas là ; réaliser une action/ne pas la réaliser…
  • Les mots ne remplissent pas tous la même fonction. L’enfant apprend d’abord à utiliser ceux qui dénomment et ceux qui permettent de désigner les objets et d’agir sur le monde (je veux, donne…). Ensuite ce sont les verbes et les adjectifs qui se multiplient.
  • Il faut attendre un stock lexical de quatre cents mots (vers 30 mois) pour voir se développer les mots grammaticaux, dont l’emploi était rare jusqu’alors.
  • Le nombre et le genre sont indiqués chez les enfants à partir de 20 mois environ.
  • Il existe de très grandes différences de développement selon les enfants. La précocité du langage ne permet pas de faire la moindre prédiction. Un enfant peut produire ses premiers mots assez tard (vers 18 mois) et avoir ensuite un très bon niveau de langage.
  • Ce qui est essentiel, c’est que l’enfant, vers un an, comprenne ce qu’on lui dit par des ordres simples, par exemple, pris dans le contexte de la vie quotidienne. À cet âge, la compréhension est un critère plus fiable qu’au début de la production.
  • En revanche, à l’école, la maîtrise du langage et en particulier l’étendue du vocabulaire est en relation avec la réussite scolaire. Autrement dit, les enfants qui réussissent le mieux à l’école sont ceux qui ont le vocabulaire le plus riche. Et cette différence est en place dès la maternelle.

Conseils pratiques

  • La règle de base est de parler avec l’enfant plus qu’à l’enfant.
  • Parler, répondre systématiquement aux vocalisations du bébé est indispensable. Certes il ne comprend pas le contenu des propos mais il apprend que ce qu’il émet a du sens pour les autres et qu’il est un vrai partenaire de communication.
  • Quand il commence à parler, il faut corriger, reformuler et enrichir ses propos le plus souvent possible et également répondre à ses questions.
  • Ce sont les propos tenus par l’adulte en réponse à ceux tenus par l’enfant qui permettront à ce dernier de développer son vocabulaire et de tenir des propos explicites.
  • On a comparé l’acquisition de mots nouveaux chez des enfants âgés de 1 an à 18 mois. Ceux qui ont regardé des DVD conçus pour augmenter le vocabulaire pendant un mois n’ont pas plus progressé que ceux qui n’ont pas bénéficié de ces DVD. Ceux qui ont le plus appris sont ceux qui ont bénéficié de conversations avec leurs parents, confirmant que c’est par ce biais que les enfants apprennent le mieux à parler.
  • Le parler bébé est à proscrire. Parler ou répondre à l’enfant en reproduisant ses erreurs n’est pas lui rendre service. Il faut lui parler simplement mais en respectant la langue.
  • Les corrections sont essentielles pour que l’enfant apprenne à bien parler. Il est normal qu’au début les enfants disent les chevals. Si on ne les corrige pas, ils mettront plus de temps à comprendre que l’on doit dire chevaux.